BIOBARDY
Céréaliers depuis 1930.
Il était plusieurs fois... La terre qui nous convient.
Thierry Bardy, les céréales de père en fils
Il était une fois : le grand-père. Nous sommes en 1929, Alexandre est chef de gare à Dakar. Sa femme, Yolande, ne supporte plus le climat tropical du Sénégal, elle veut rentrer "al païs". Ils reviennent donc en France et posent leurs valises à l'exploitation familiale de Lagrave, dans le Tarn. Leur spécialité : le blé.
Il était une autre fois : le père. Nous sommes en 1955, Léon devient responsable de l'exploitation agricole. Il la connaît fort bien puisqu'il travaille avec Alexandre depuis son enfance. Léon rencontre Reine, ils se marient en 1958 et implantent de nouvelles cultures. Notamment luzerne et tournesol.
Il était une nouvelle fois : le fils. Nous sommes en 1988, Thierry perpétue la tradition familiale transmise avant Alexandre, le grand-père. Il ne sait pas exactement quand ; parfois, les parents s'en vont avec une partie de notre histoire. L'histoire, on la vit, on ne pense pas toujours la raconter.
Léon, les boeufs et la pierre à battre le blé
Le rouleau de pierre servait à séparer le grain de la paille, après les moissons.
C'est l'ancêtre du principe de la moissonneuse.
Lorsque j'ai demandé à Thierry : "pourquoi cette envie de convertir vos terres au bio ?"
Il m'a répondu plusieurs choses :
"Je ne supportais plus de m'empoisonner et d'empoisonner la terre, c'était ça ou arrêter. Mon père, c'était debout à 6 heures pour s'occuper des champs avec son tracteur Porsche. C'est d'ailleurs avec lui que j'ai appris la conduite. Mes parents n'avaient pas le permis de conduire, notre horizon, c'était le tour de la ferme. Je ne m'en plains pas du tout ! J'aime la simplicité et cette simplicité, je l'ai retrouvée dans l'agriculture biologique. Elle m'a montré une autre façon de cultiver et de vivre en autarcie, de ressemer nos propres semences. Cette simplicité, c'est l'héritage de mes parents qui vivaient à l'ancienne, entourés de 4 enfants à élever, de la nature et de leurs 15 hectares de terre. C'est pour toutes ces raisons que je m'intéresse aux blés anciens."
Son envie de prendre soin de ce précieux héritage, de le faire évoluer sans pour autant le dénaturer, fait qu'il se lance dans une nouvelle activité : un atelier qui transforme ses céréales en produits alimentaires et cosmétiques biologiques. Cet atelier voit le jour au sein d'une seconde exploitation, à Caillavet, dans le Gers. Pour des raisons de commodité : conseiller municipal à la mairie, Thierry est très actif pour cette nouvelle communauté.
Thierry a alors besoin de "bras" supplémentaires. Il souhaite travailler avec une personne de confiance, qui parle la même langue que lui : respect de l'environnement, attachement à la terre, aux racines, aux traditions. Une personne qui saura aussi "raconter tout ça".
Car Thierry, c'est l'homme de la terre, il est plus à l'aise sur son tracteur qu'avec un client. Thierry, c'est aussi le jardinier bio, celui qui prend en photo la coccinelle posée sur son tournesol, l'agri-poète qui adore les chansons de Murat, cet autre petit-fils de paysan.
Être paysan, ce n'est pas un terme péjoratif, comme on peut l'entendre parfois. Le paysan, c'est la personne qui vit à la campagne de ses activités agricoles. Dans le mot paysan, il y a "pays", qui se réfère à la terre. Thierry est fier d'être paysan et c'est en grande partie la raison qui m'a poussée à contacter l'ADEAR lorsque j'ai commencé à travailler avec lui. Cette association met en valeur la philosophie paysanne : autoconsommation et résilience.
Nadine Fauré : volèm viure al païs
« Volèm viure al país ! » C'est cet autocollant que mon père avait collé à l'arrière de notre Ami 6 familiale, lorsque j'étais enfant. Juste à côté de celui où on voyait un garçon faire pipi alors que le message nous invitait à boire du vin. Je ne comprenais pas ce que voulaient dire ces injonctions visuelles, force est de constater qu'elles m'ont marquées.
Bien qu'ayant passé les cinq premières années de ma vie en Allemagne, mon père, l'ariégeois-coeur-musicien, était militaire basé à Baden-Baden ; bien que ma mère ait voulu fuir cette Allemagne comme la peste étant donné que son père s'était remarié avec une Allemande durant la guerre et cette histoire, je ne suis pas près de l'oublier, elle m'en a parlé toute sa vie (dites-moi si j'écris des phrases trop longues) ; bien qu'elle soit devenue Dame des PTT, à Paris puis à Béziers ; bien que mon oncle Péruvien se soit installé au Maroc pour mener à bien ses missions de géologue ; bien que le père de mes enfants ait des origines italo-polonaises... et je vous fais grâce de toutes les occasions qui auraient pu me donner le goût du voyage... Je n'ai pas l'âme d'une globe-trotter. Du tout : j'en reviens toujours à mes racines maternelles qui se trouvent en Corbières-Minervois. Au-dessus, c'est le Nord. J'exagère, mais il y a du vrai.
Il était trois fois : Papé, Mamé, Maman. Béranger était viticulteur à Coustouge, petit village des Corbières entouré de la garrigue où j'ai passé une partie de mon enfance et de ma vie d'adulte. Papé rafraîchissait sa bouteille de Corbières dans le puits, à côté de Cheval, son fidèle allié pour labourer les vignes. Il était à ses côtés sa dulcinée, Mamé. Léa s'occupait du jardin, la boutique bio de la maisonnée, où elle ramassait des orties pour s'en frictionner les jambes, le matin, durant sa toilette. Paraît-il que c'est bon pour faire circuler le sang. Ce sont eux qui ont élevé ma mère durant la guerre, ce sont eux qui lui ont transmis l'amour de la terre et... Elle en a fait de même.
J'arrêterai là ces quelques souvenirs, transmis et non romancés, qui ne sont écrits que pour expliquer combien mes origines terriennes et occitanes font lien avec celles de Thierry. Et c'est ce lien qui nous a donné l'envie de travailler ensemble. Sans oublier, tout de même, mes compétences professionnelles, mon grand intérêt pour notre environnement ainsi que mes terres. De celles-ci, j'en parlerai très certainement, une autre fois...
Lorsqu'on achète un produit, il y a une histoire qui l'accompagne.
Je vous ai, succinctement, écrit la nôtre.
Nadine et P/ Thierry
Chacun a son monde.